mardi 29 mai 2012

Une citation sur... les citations...

"Nous ne notons jamais que nos propres paroles, quel que soit celui qui les a écrites." - Marcel Cohen.

Cette citation a été twittée par Ronald Klapka le 27 mai 2012 (11h15) et je l'ai vue lorsque François Bon l'a retwittée... Elle m'a interpellée, sans doute parce que j'ai depuis des décennies (depuis le lycée en fait, ce qui avec une datation au carbone 14, commence à faire un nombre d'années impressionnant, argh) un petit carnet rempli des mots des autres. Ces mots qui m'ont fait réfléchir, ces mots qui m'ont séduite, ces mots qui m'ont surprise. Je le relis de temps à autre avec plaisir et je continue à ajouter quelques mots glanés de ci de là. Alors qui s'exprime à travers ces mots des autres que je relève soigneusement ? 
Et vous, notez-vous les citations qui vous parlent ?

lundi 28 mai 2012

Le rapport de Brodeck de Philippe Claudel

Voici un livre que j'ai lu dans le cadre professionnel... En effet, et ceci est un véritable coming out, j'enseigne les lettres dans un lycée. Et honte à moi, si j'avais déjà lu Les Âmes grises et La petite fille de monsieur Linh, je n'avais pas encore lu Le Rapport de Brodeck. Or il figurait sur la liste de textes présentés à l'oral du bac blanc par les élèves d'un de mes collègues. Je l'ai donc bien évidemment lu ! Et avec plaisir qui plus est !

L'éditeur en parle et cite le résumé de la quatrième de couverture : 
Je m’appelle Brodeck et je n’y suis pour rien. Je tiens à le dire. Il faut que tout le monde le sache. Moi je n’ai rien fait, et lorsque j’ai su ce qui venait de se passer, j’aurais aimé ne jamais en parler, ligoter ma mémoire, la tenir bien serrée dans ses liens de façon à ce qu’elle demeure tranquille comme une fouine dans une nasse de fer. Mais les autres m’ont forcé : « Toi, tu sais écrire, m’ont-ils dit, tu as fait des études. » J’ai répondu que c’étaient de toutes petites études, des études même pas terminées d’ailleurs, et qui ne m’ont pas laissé un grand souvenir. Ils n’ont rien voulu savoir : « Tu sais écrire, tu sais les mots, et comment on les utilise, et comment aussi ils peuvent dire les choses […]. »

Sur le site de l'éditeur initial, Stock, d'autres informations :  
Le métier de Brodeck n’est pas de raconter des histoires. Son activité consiste à établir de brèves notices sur l’état de la flore, des arbres, des saisons et du gibier, de la neige et des pluies, un travail sans importance pour son administration. Brodeck ne sait même pas si ses rapports parviennent à destination. Depuis la guerre, les courriers fonctionnent mal, il faudra beaucoup de temps pour que la situation s’améliore.
« On ne te demande pas un roman, c’est Rudi Gott, le maréchal-ferrant du village qui a parlé, tu diras les choses, c’est tout, comme pour un de tes rapports. »
Brodeck accepte. Au moins d’essayer. Comme dans ses rapports, donc, puisqu’il ne sait pas s’exprimer autrement. Mais pour cela, prévient-il, il faut que tout le monde soit d’accord, tout le village, tous les hameaux alentour. Brodeck est consciencieux à l’extrême, il ne veut rien cacher de ce qu’il a vu, il veut retrouver la vérité qu’il ne connait pas encore. Même si elle n’est pas bonne à entendre.
« A quoi cela te servirait-il Brodeck ? s’insurge le maire du village. N’as-tu pas eu ton lot de morts à la guerre ? Qu’est-ce qui ressemble plus à un mort qu’un autre mort, tu peux me le dire ? Tu dois consigner les événements, ne rien oublier, mais tu ne dois pas non plus ajouter de détails inutiles. Souviens-toi que tu seras lu par des gens qui occupent des postes très importants à la capitale. Oui, tu seras lu même si je sens que tu en doutes... » Brodeck a écouté la mise en garde du maire.
Ne pas s’éloigner du chemin, ne pas chercher ce qui n’existe pas ou ce qui n’existe plus. Pourtant, Brodeck fera exactement le contraire.

Ce qui m'a donné envie de le lire : 
Je pourrais dire que nécessité a fait loi (cf. plus haut). Mais j'apprécie la plume de Philippe Claudel et je me suis réjouie à l'idée de lire ce livre ! 

Mon avis après lecture : 
Comme toujours, Philippe Claudel emporte son lecteur dans son monde. Un monde âpre, dur, pesant, étouffant presque, avec une écriture ciselée que les lycéens ont distinguée en 2007 par le Goncourt des Lycéens, ce qui prouve bien, une fois de plus, qu'ils ne cherchent pas la facilité lors de leur choix !

Bonheur de phrases :
"J'ai le sentiment que je ne suis pas fait pour ma vie. Je veux dire que ma vie déborde de toute part, qu'elle n'est pas taillée pour un homme comme moi, qu'elle se remplit de trop de choses, de trop d'événements, de trop de misères, de trop de failles."
"Il y a de toute ans ce fatras. J'y vide ma vie. Écrire soulage mon cœur et mon ventre."
"Au fond, raconter n'est peut-être pas un remède si sûr que cela. Peut-être qu'au contraire raconter ne sert qu'à entretenir les plaies, comme on entretient les braises d'un feu afin qu'à notre guise, il puisse repartir de plus belle."
"On craint celui qui se tait, celui qui ne dit rien. Comment savoir ce que pense celui qui demeure muet ?"
et une dernière à laquelle je ne peux résister... "L'idiotie est une maladie qui va bien avec la peur. L'une et l'autre s'engraissent mutuellement, créant une gangrène qui ne demande qu'à se propager."

On en parle ailleurs :
Ce livre est paru il y a déjà cinq ans... autant dire une éternité (ou peut-être deux ! ;-) à l'échelle de la blogosphère ! Tout le monde en a donc déjà parlé : je vous fais confiance pour trouver !

vendredi 25 mai 2012

Juste une citation de Jean-Philippe Toussaint citant Beckett...

En passant, voici la réponse de Jean-Philippe Toussaint à la question "Quelle a été votre plus grande erreur ?" : 

«Je ne vois pas de quoi vous voulez parler. À peine ai-je donné mon accord pour répondre à vos questions qu'on me demande quelle est ma plus grande erreur. "Le tort qu'on a, c'est d'adresser la parole aux gens", dit Beckett.»
 
J'aime beaucoup, pas vous ? Mon côté misanthrope sans doute... 
Sinon, le blog sort de sa léthargie : j'ai eu du mal à reprendre le rythme après quelques soucis, mais c'est reparti avec des lectures ou relectures diverses à venir, et aussi des expositions et des spectacles ! 

NB C'est dans le Télérama du 9 mai dernier que j'ai lu cela !