jeudi 31 janvier 2013

Le Chapeau de Mitterrand d'Antoine Laurain

Voici un livre déjà chroniqué par toute la blogosphère... et comme d'habitude, j'arrive après la bagarre ! Les avis lus ICI (clic) ou encore ICI (clic) m'avaient donné envie de lire ce livre alors quand je l'ai vu disponible sur la table de ma médiathèque préférée... Je n'ai pas pu résister.

L'éditeur en parle en citant la quatrième de couverture : 
"Un soir à Paris, Daniel Mercier, comptable, dîne en solitaire dans une brasserie, quand un illustre convive s'installe à la table voisine : François Mitterrand. Son repas achevé, le Président oublie son chapeau, que notre Français moyen décide de s'approprier en souvenir. Il ignore que son existence va en être bouleversée. Tel un talisman, ce célèbre feutre noir ne tarde pas à transformer le destin du petit employé au sein de son entreprise. Daniel aurait-il percé le mystère du pouvoir suprême ? Hélas, il perd à son tour le précieux objet qui poursuit sur d'autres têtes son voyage atypique au sein de la société française des années 1980. Cette fable pleine d'esprit et de malice possède comme le fameux chapeau un charme mystérieux - celui de ressusciter une époque et, surtout, de mettre au jour à travers une galerie de personnages notre rêve commun : voir s'accomplir par magie nos désirs les plus secrets."

Ce qui m'a donné envie de le lire : je vous l'ai dit, ce sont des commentaires sur la blogosphère qui m'ont tentée. J'ajoute que le livre a reçu le prix Landerneau Découvertes 2012 (prix décerné par des libraires) et aussi le prix Relay 2012 (prix décerné par les voyageurs !). J'ai aussi trouvé amusant ce que l'auteur a raconté de son inspiration (voir sur le blog Bric à Book ICI) à savoir que la perte d'un objet personnel, un chapeau en l'occurrence (évidemment !), était à l'origine du roman !
J'ai aussi été séduite pas l'épigraphe, une citation de Tristan Bernard: "Le fait d'avoir un chapeau sur la tête vous confère une indéniable autorité sur ceux qui n'en ont pas." Argh. Il va falloir que je regarde si j'ai une tête à chapeau ;-)

Mon avis après lecture : 
J'ai beaucoup aimé l'originalité du sujet et la fraîcheur de ce livre ! Enfin du neuf ! Le style est simple et fluide et correspond bien à l'époque évoquée (les années 1980). L'épilogue donne à la chute une saveur particulière. J'ai donc pris un grand plaisir à cette découverte (je ne connaissais pas du tout Antoine Laurain) à la fois divertissante et merveilleuse, par son allure de conte qu'on aurait aimé vivre.

Bonheur de phrases : 

"Tous faisaient cercle autour de lui, surexcités qu'ils étaient de découvrir en la personne de leur collègue une force tranquille qui avait su défendre leurs intérêts mieux que ne l'aurait fait le plus radical des syndicalistes ou le meilleur ténor du barreau. [...] Cette situation nouvelle ne le surprenait pas plus que cela. C'était comme si le vrai Daniel Mercier était enfin apparu au grand jour. Le précédent n'était qu'une sorte de prototype inabouti, une sorte de brouillon."

"Elle regarda  sa silhouette au détour d'une glace dans la vitrine d'un magasin de prêt-à-porter. Ce chapeau donnait une noblesse inhabituelle à la découpe de son visage, pour qu'il tienne correctement elle avait relevé ses cheveux en chignon. Peut-être devrait-elle les porter ainsi à partir de maintenant, et constamment sortir avec un chapeau d'homme en feutre noir. Il lui sembla que le port de cet accessoire lui donnait un nouveau pouvoir, à la manière de ces vêtements de marque qu'elle s'offrait si rarement."

"Cette fois-ci, rien ne lui venait depuis qu'il était allongé sur le divan. Il avait posé le chapeau sur ses cuisses et le caressait doucement pour passer le temps. Ce mouvement répété de ses dpoigts sur le feutre lui suggéra une image sortie de son enfance : Aladin qui frottait sa lampe de laiton pour voir apparaître le bon génie lui proposant d'exaucer ses vœux."

Un très bon moment de lecture ! N'hésitez pas si vous le trouvez sur votre chemin !

vendredi 25 janvier 2013

La Vérité sur l'affaire Harry Quebert de Joël Dicker

Ce roman a obtenu le grand prix de l'Académie française et aussi le Goncourt des lycéens. Qui dit Goncourt des lycéens dit lecture possible en classe alors... je me suis précipitée.

L'éditeur en parle : il s'agit d'une co-édition De Fallois / L’Âge d'homme et cette dernière édition reprend la quatrième de couverture

"À New York, au printemps 2008, alors que l’Amérique bruisse des prémices de l’élection présidentielle, Marcus Goldman, jeune écrivain à succès, est dans la tourmente : il est incapable d’écrire le nouveau roman qu’il doit remettre à son éditeur d’ici quelques mois.

Le délai est près d’expirer quand soudain tout bascule pour lui : son ami et ancien professeur d’université, Harry Quebert, l’un des écrivains les plus respectés du pays, est rattrapé par son passé et se retrouve accusé d’avoir assassiné, en 1975, Nola Kellergan, une jeune fille de 15 ans, avec qui il aurait eu une liaison.

Convaincu de l’innocence de Harry, Marcus abandonne tout pour se rendre dans le New Hampshire et mener son enquête. Il est rapidement dépassé par les événements : l’enquête s’enfonce et il fait l’objet de menaces. Pour innocenter Harry et sauver sa carrière d’écrivain, il doit absolument répondre à trois questions : Qui a tué Nola Kellergan ? Que s’est-il passé dans le New Hampshire à l’été 1975 ? Et comment écrit-on un roman à succès ?

Sous ses airs de thriller à l’américaine, La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert est une réflexion sur l’Amérique, sur les travers de la société moderne, sur la littérature, sur la justice et sur les médias.

Joël Dicker est né à Genève en 1985. La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert est son deuxième roman. Il y dépeint une Amérique qu’il connaît bien pour y avoir beaucoup voyagé et longuement séjourné."

Ce qui m'a donné envie de le lire : J'avais déjà décidé de le lire avant qu'il ne soit primé. J'adore les livres qui parlent d'écriture et d'écrivain... Il m'était donc impossible de résister à celui-ci !


Mon avis après lecture : J'ai vraiment beaucoup aimé. Les quelques longueurs ne m'ont pas gênée, j'ai trouvé que c'était un véritable "page-turner" ! On a vraiment envie d'avoir le fin mot de l'histoire !

J'ai également apprécié le mélange avec les conseils d'écriture... J'ai toujours rêvé d'écrire, mes tiroirs sont remplis de début mais je voue une telle admiration aux écrivains que je me sens évidemment bien trop petite (et à présent bien trop vieille... pff quand je pense qu'un célèbre éditeur m'avait demandé de lui envoyer mon travail dans les années 80... au temps où le salon du livre était encore au Grand Palais... je vous parle d'un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître) et complètement illégitime pour oser écrire !

Mais là n'est pas le propos. C'est un livre d'un abord facile, avec une véritable enquête quasi-policière menée par Marcus, et je ne suis pas étonnée que cet ouvrage ait séduit les lycéens pour leur Goncourt, malgré son impressionnante épaisseur (qui aurait raison de mes propres élèves, je l'avoue : 665 pages... je n'ai aucune illusion sachant que 200 pages d'un livre de poche leur semblent déjà insurmontables...). Cela dit, je pense qu'il plaira à un lectorat pas forcément habitué à la lecture de prix littéraires. Peut-être un pavé de plage, même si ce n'est guère la saison ?

Bonheur de phrases : moi qui adore les livres qui parlent de livres et d'écrivains... j'en ai plein !

"[...] écrire des livres, ce n'est pas rien : tout le monde sait écrire, mais tout le monde n'est pas écrivain.
-- Et comment sait-on que l'on est écrivain, Harry ?
-- Personne ne sait qu'il est écrivain. Ce sont les autres qui le lui disent."

"Être écrivain, c'est être vivant. [...]. Le jour où écrire donnera un sens à votre vie, vous serez un véritable écrivain. D'ici là, surtout, n'ayez pas peur de tomber."

"Écrire un livre, c'est comme aimer quelqu'un : ça peut devenir très douloureux."

"Les mots sont à tout le monde, jusqu'à ce que vous prouviez que vous êtes capable de vous les approprier. Voilà ce qui définit un écrivain. Et vous verrez, Marcus, certains voudront vous faire croire que le livre est un rapport aux mots, mais c'est faux : il s'agit en fait d'un rapport aux gens."

"Publier, cela signifie que ce que vous avez écrit si solitairement vous échappe soudain des mains et s'en va disparaître dans l'espace public. C'est un moment de grand danger [...]. Perdre le contrôle de son propre livre, c'est une catastrophe.

"Les mots c'est bien, Marcus. Mais n'écrivez pas pour qu'on vous lise : écrivez pour être entendu."


Je sais que les avis ne sont pas unanimes mais pour ma part, je ne regrette pas ma lecture !

dimanche 20 janvier 2013

Au Bonheur des Dames d'Émile Zola

Stephie, du blog Mille et une pages (CLIC) a lancé le défi Un Classique par mois sur son blog (Re-clic !). J'ai décidé de le relever et pour commencer, j'ai choisi... l'auteur classique préféré de Stephie, justement ! 

Laissons la parole à l'auteur : 
« Je veux faire le poème de l'activité moderne. Donc, changement complet de philosophie : plus de pessimisme d'abord, ne pas conclure à la bêtise et à la mélancolie de la vie, conclure au contraire à son continuel labeur, à la puissance et à la gaieté de son enfantement. En un mot aller avec le siècle, exprimer le siècle qui est un siècle d'action et de conquête, d'efforts dans tous les sens. [...] Ensuite, comme conséquence, montrer la joie de l'action et le plaisir de l'existence ; il y a certainement des gens heureux de vivre, dont les jouissances ne ratent pas et qui se gorgent de bonheur et de succès : ce sont ces gens-là que je veux peindre, pour avoir l'autre face de la vérité. » C'est ce que Zola écrivait dans son ébauche du livre Au Bonheur des dames.

L'éditeur en parle (édition Folio) : 
"Le Second Empire vise à faire de Paris la capitale de la mode et du luxe. La ville se modernise. Les boutiques du Paris ancien laissent place peu à peu aux grands magasins, dans le voisinage des boulevards et de la gare Saint-Lazare. La nouvelle architecture illustre l'évolution des goûts : on entre dans le royaume de l'illusion. Octave Mouret, directeur du Bonheur des Dames, se lance dans le nouveau commerce.
L'exploit du romancier est d'avoir transformé un épisode de notre histoire économique en aventure romanesque et en intrigue amoureuse. Rien d'idyllique pourtant : le magasin est construit sur un cadavre ensanglanté, et l'argent corrompt tout. Pour Zola, la réussite du grand magasin s'explique par la vanité des bourgeoises et le règne du paraître. Il nous décrit ici la fin et la naissance d'un monde : Paris, incarné ici dans un de ses mythes principaux, devient l'exemple de la cité moderne."

Ce qui m'a donné envie de le (re)lire : euh... d'abord de bêtes raisons professionnelles, avouons-le ! Mais c'est toujours un plaisir de lire cette œuvre dans laquelle on trouve toutes les tentations féminines (et les manipulations dont elles sont l'objet) alors que les soldes battent leur plein autour de nous ;-). Mon amie Miaou du blog Miaouzdays (CLIC) relit aussi régulièrement Au Bonheur des dames !
De plus, je voulais un Zola pour ce premier challenge car je sais combien Stephie est une passionnée de cet auteur ! 

Mon avis après lecture : J'aime Zola. Et j'aime Au Bonheur des dames, qui malgré la vision du petit commerce écrasé par les grosses structures, fait montre d'un certain optimisme, même s'il demeure très relatif...

Bonheur de phrases :

"J'ai la femme, je me fiche du reste ! dit-il [NDLR : Octave Mouret, parlant de sa clientèle Au Bonheur des Dames...] dans un aveu brutal que la passion lui arracha."
 
"C'était la femme que les magasins se disputaient par la concurrence, la femme qu'ils prenaient au continuel piège de leurs occasions, après l'avoir étourdie devant leurs étalages. Ils avaient éveillé dans sa chair de nouveaux désirs, ils étaient une tentation immense, où elle succombait fatalement; cédant d'abord à des achats de bonne ménagère, puis gagnée par la coquetterie, puis dévorée."

"Elles ne se lassaient pas de cette chanson du blanc, que chantaient les étoffes de la maison entière. [...] Sous l'écroulement de ces blancheurs, dans l'apparent désordre des tissus, tombés comme au hasard des cases éventrées, il y avait une phrase harmonique, le blanc suivi et développé dans tous ses tons, qui naissait, grandissait, s'épanouissait, avec l’orchestration compliquée d'une fugue de maître, dont le développement continu emporte les âmes d'un vol sans cesse élargi. Rien que du blanc, et jamais le même blanc, tous les blancs, s'enlevant les uns sur les autres s'opposant, se complétant, arrivant à l'éclat même de la lumière."

"Ce qui ravissait, c'était, au milieu, une fontaine d'argent, une bergère debout sur une moisson de fleurs et d'où coulait un filet continu d'eau de violette, qui résonnait musicalement dans la vasque de métal. Une senteur exquise s'épandait alentour, les dames en passant trempaient leurs mouchoirs."

Zola s'est inspiré de la réalité des tout nouveaux grands magasins de l'époque. Et nos grands magasins actuels ont certes évolué, mais... ont-ils changé tant que cela ? Ne sont-ils pas toujours des nids à tentations ? (héhé je dis ça mais je n'y vais quasiment jamais alors... ;-) Qu'en pensez-vous ?



Tous ensemble, mais sans plus de Georges Flipo


Héhé je ne suis pas une grande lectrice de recueil de nouvelles, mais j'avoue que cet opus m'a réconciliée avec le genre ! Cela fait déjà un moment que je l'ai terminé sans prendre le temps d'en parler ici, je vais de suite combler cette lacune !

L'éditeur en parle : avec un résumé de la nouvelle éponyme (autrement dit celle qui donne son titre au recueil)

"– Des pingouins ! Vous êtes comme des pingouins sur la banquise, tous à vous renifler, à lustrer votre plumage… Et vous vous serrez l’un contre l’autre, frissonnants, dès que souffle un vent mauvais… Malheur à l’intrus : vous lui souriez, mais vous le regardez les yeux dans les pieds, à guetter sous ses palmes la moindre fissure de la glace, en espérant qu’elle devienne fracture, béante, qu’elle l’entraîne le plus loin possible, et allez, ciao ! Tous ensemble, bien sûr, mais sans plus. Sans les trop vieux, les trop pauvres, les trop colorés, les trop moches. Sans les trop autres.

– Allons, mon ami, ce ne sont que des mots. Words, words, words…"

et en présentant l'auteur : Georges Flipo est l’auteur de plus de soixante nouvelles pour la radio (Radio France, France Bleu) et a publié huit livres ; son dernier recueil, Qui comme Ulysse, a été applaudi par la critique et dans les blogs littéraires, avant d’être couronné par le jury du Prix Ozoir’Elles, présidé par Régine Deforges.

Ce qui m'a donné envie de le lire : des commentaires très positifs sur divers blogs (par exemple ICI chez Leil et chez Dan) et aussi le fait que j'ai déjà lu son roman Le Vertige des auteurs, dont je vous ai parlé ICI et que je l'ai adoré !
Pourtant, je dois avouer que je ne suis pas une fervente lectrice de nouvelles, mais me voici réconciliée avec le genre. J'ai évidemment, pour des raisons personnelles transparentes, beaucoup aimé "Le naturalisme chez Zola" avec le récit d'un oral de français au bac durant lequel le professeur se fait un peu "avoir" par l'élève et aussi "La maîtrise de la langue" si difficile pour les non-francophones (et parfois pour les francophones eux-mêmes !) Mais je crois que ma préférée reste la première "Le Club Vie intense" où les seniors sont invités à des activités particulièrement propices à la montée d'adrénaline et où personne ne sait vraiment quoi dire devant l'existence de ce genre de club...

Mon avis après lecture :
Je me croyais réfractaire aux nouvelles et il n'en est rien ! J'ai vraiment passé un excellent moment, j'ai aimé l'humour omniprésent, le regard mi-cynique, mi-désabusé, à la fois ironique et tendre porté sur la société d'aujourd'hui et ses travers.

Bonheur de phrases :

"Ce serait surtout la dernière élève de sa vie : dans trois mois, il prendrait sa retraite de professeir de lettres et serait probablement dispensé de venir travailler au mois de septembre. Il adressa une vague prière à l'au-delà, sans destinataire précis. Il demanda que tout se passe bien, il voulait garder un beau souvenir de cette littérature qu'il avait distillée toute sa vie avec une folle espérance."

"Et Pauline rentre à l'hôtel en extase, radieuse. Elle ne saura jamais qui était cet homme qui n'aura fait qu'une éphémère apparition dans sa vie mais qui l'aura illuminée. Il était si beau. Beau comme un ange."

"Est-ce que Michel leur plairait ? Elle s'en fichait : à son âge, les convenances sociales s'effilochaient, comme une vieille peau attaquée par les escarres."

Ce recueil ne venant pas de sortir, vous trouverez des billets sur lui dans tous les blogs littéraires ou presque ! Et globalement, les avis sont très positifs ! Alors, si vous ne l'avez pas encore lu, vous savez ce qu'il vous reste à faire !J'ajoute que beaucoup ont noté l'allusion à Gavalda du titre... Pour ma part, j'avoue que j'ai aussi pensé aux slogans des manifs... "Tous ensemble, tous ensemble, hey, hey !" ;-)