dimanche 28 février 2016

La Maladroite d'Alexandre Seurat

Voici aujourd'hui une lecture choc que je ne suis pas près d'oublier. 


L'éditeur en parle : 

"Inspiré par un fait divers récent, le meurtre d’une enfant de huit ans par ses parents, La maladroite recompose par la fiction les monologues des témoins impuissants de son martyre, membres de la famille, enseignants, médecins, services sociaux, gendarmes… Un premier roman d’une lecture bouleversante, interrogeant les responsabilités de chacun dans ces tragédies de la maltraitance."


Ce qui m'a donné envie de le lire : 

J'avais lu des critiques sur ce livre lors de sa sortie, en particulier celle de Leiloona, du blog Bricabook, ICI. Leiloona y parlait d'un roman "coup-de-poing" loin d'être un "feel good book" et malgré cela, alors que j'aime souvent les lectures légères, j'ai eu envie de lire ce premier roman (d'un collègue). 


Mon avis après lecture :

J'ai, comme tous les lecteurs de ce roman je crois, pris une grande claque. Leiloona évoquait une progression du lecteur dans l'oeuvre la gorge nouée et c'est tout à fait ça. L'histoire de la petite Diana bouleverse, émeut et l'on ne peut en sortir indemne, d'autant que le fait divers qui a inspiré l'auteur est encore vif dans les mémoires. Aurait-on pu éviter un tel drame ? 
L'auteur ne sombre jamais dans le pathos, les cruautés infligées à la fillette ne sont jamais précisées, mais la lecture laisse monter l'impression atroce du drame imminent et inévitable. 
La polyphonie ajoute à la douleur que l'on ressent à la lecture : chacun a fait, à sa mesure, ce qu'il a pu, ce qu'il "devait faire"... et pourtant les lenteurs administratives, le manque de communication parfois, ont eu raison de toutes les tentatives d'aide à Diana et à sa famille en souffrance. 
Nini DS a lu ce livre il y a peu et dit qu'elle en est sortie "sonnée" (voir son billet ICI). C'est tout à fait ça. Et l'uppercut reçu laisse KO. 


Quelques phrases : 

"Alors, je ne vois plus ma classe, mes élèves se figent en noir et blanc -- et parmi eux, il y a Diana : elle est la seule à ne pas être en noir et blanc et à ne pas être immobile, je la sais en danger, elle me regarde, comme si elle guettait de moi ce que je peux faire, ce que je vais faire. Mais dans le cauchemar, je sais que tout est déjà trop tard pour elle, elle me regarde, et je ne peux rien faire, et je voudrais qu'elle me pardonne." (l'institutrice)

"[La médecin scolaire] s'est tue un moment, a souri, puis a dit lentement que c'était plus compliqué que ça, qu'avant de jeter le discrédit sur une famille, il fallait une certaine circonspection -- c'étaient ses termes, discrédit, circonspection, et elle a dit que les droits de la famille prévalaient, qu'il fallait des faits concrets. Pendant un moment, je n'ai rien pu dire. Des faits concrets ? Elle m'a calmement raccompagnée à la porte." (l'institutrice)

"[...] il [le policier] insistait, il voulait savoir si je pouvais avoir une idée d'où elle serait allée, où elle aurait aimé partir, ma soeur, si elle était partie, mais je n'en savais rien. Alors il m'a demandé ce que j'imaginais qu'elle aurait pu vouloir que je fasse pour elle, s'il lui était arrivé quelque chose. Je l'ai regardé, et j'ai failli lui dire qu'elle n'aurait jamais pensé à ce que j'aurais pu faire pour elle, parce que personne n'avait jamais rien fait pour elle, et que je ne ferais rien pour elle, puisque c'était fini. Mais j'ai rien dit." (le frère)

Voilà. Un livre à lire absolument, même s'il est dur. 

5 commentaires:

  1. Tout à fait ce que j'ai ressenti en lisant ce livre : l'impression d'un drame évident, malgré toute l'envie que l'on peut ressentir à vouloir que Diana s'en sorte... Tu as raison, même si c'est un uppercut, c'est un livre à lire absolument.
    Bises, bon dimanche.

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  2. Je relis ton billet et avec lui remontent les émotions ressenties lors de cette lecture ... De nouveau froid dans le dos. Quelle maîtrise de la narration aussi pour un premier roman ...

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  3. Un sacré bouquin que je relirai sans doute et que j'offrirai aussi

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  4. Je l'ai réservé à la médiathèque, le billet de Leil m'avait donné envie de le lire et ton avis sur ce livre me confirme qu'il est incontournable.

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  5. J'ai aimé ce livre à quelques bémols près et ne me suis pas sentie si sonnée que cela pour avoir cotyé ces situations de près dans la vraie vie. Mais mes élèves adorent.

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