Voici un livre que j'ai lu dans le cadre professionnel... En effet, et ceci est un véritable coming out, j'enseigne les lettres dans un lycée. Et honte à moi, si j'avais déjà lu Les Âmes grises et La petite fille de monsieur Linh, je n'avais pas encore lu Le Rapport de Brodeck. Or il figurait sur la liste de textes présentés à l'oral du bac blanc par les élèves d'un de mes collègues. Je l'ai donc bien évidemment lu ! Et avec plaisir qui plus est !
L'éditeur en parle et cite le résumé de la quatrième de couverture :
Je m’appelle Brodeck et je n’y suis pour rien. Je tiens à le dire. Il
faut que tout le monde le sache. Moi je n’ai rien fait, et lorsque j’ai
su ce qui venait de se passer, j’aurais aimé ne jamais en parler,
ligoter ma mémoire, la tenir bien serrée dans ses liens de façon à ce
qu’elle demeure tranquille comme une fouine dans une nasse de fer. Mais
les autres m’ont forcé : « Toi, tu sais écrire, m’ont-ils dit, tu as
fait des études. » J’ai répondu que c’étaient de toutes petites études,
des études même pas terminées d’ailleurs, et qui ne m’ont pas laissé un
grand souvenir. Ils n’ont rien voulu savoir : « Tu sais écrire, tu sais
les mots, et comment on les utilise, et comment aussi ils peuvent dire
les choses […]. »
Sur le site de l'éditeur initial, Stock, d'autres informations :
Le métier de Brodeck n’est pas de raconter des histoires. Son activité
consiste à établir de brèves notices sur l’état de la flore, des arbres,
des saisons et du gibier, de la neige et des pluies, un travail sans
importance pour son administration. Brodeck ne sait même pas si ses
rapports parviennent à destination. Depuis la guerre, les courriers
fonctionnent mal, il faudra beaucoup de temps pour que la situation
s’améliore.
« On ne te demande pas un roman, c’est Rudi Gott, le maréchal-ferrant du village qui a parlé, tu diras les choses, c’est tout, comme pour un de tes rapports. »
Brodeck accepte. Au moins d’essayer. Comme dans ses rapports, donc, puisqu’il ne sait pas s’exprimer autrement. Mais pour cela, prévient-il, il faut que tout le monde soit d’accord, tout le village, tous les hameaux alentour. Brodeck est consciencieux à l’extrême, il ne veut rien cacher de ce qu’il a vu, il veut retrouver la vérité qu’il ne connait pas encore. Même si elle n’est pas bonne à entendre.
« A quoi cela te servirait-il Brodeck ? s’insurge le maire du village. N’as-tu pas eu ton lot de morts à la guerre ? Qu’est-ce qui ressemble plus à un mort qu’un autre mort, tu peux me le dire ? Tu dois consigner les événements, ne rien oublier, mais tu ne dois pas non plus ajouter de détails inutiles. Souviens-toi que tu seras lu par des gens qui occupent des postes très importants à la capitale. Oui, tu seras lu même si je sens que tu en doutes... » Brodeck a écouté la mise en garde du maire.
Ne pas s’éloigner du chemin, ne pas chercher ce qui n’existe pas ou ce qui n’existe plus. Pourtant, Brodeck fera exactement le contraire.
« On ne te demande pas un roman, c’est Rudi Gott, le maréchal-ferrant du village qui a parlé, tu diras les choses, c’est tout, comme pour un de tes rapports. »
Brodeck accepte. Au moins d’essayer. Comme dans ses rapports, donc, puisqu’il ne sait pas s’exprimer autrement. Mais pour cela, prévient-il, il faut que tout le monde soit d’accord, tout le village, tous les hameaux alentour. Brodeck est consciencieux à l’extrême, il ne veut rien cacher de ce qu’il a vu, il veut retrouver la vérité qu’il ne connait pas encore. Même si elle n’est pas bonne à entendre.
« A quoi cela te servirait-il Brodeck ? s’insurge le maire du village. N’as-tu pas eu ton lot de morts à la guerre ? Qu’est-ce qui ressemble plus à un mort qu’un autre mort, tu peux me le dire ? Tu dois consigner les événements, ne rien oublier, mais tu ne dois pas non plus ajouter de détails inutiles. Souviens-toi que tu seras lu par des gens qui occupent des postes très importants à la capitale. Oui, tu seras lu même si je sens que tu en doutes... » Brodeck a écouté la mise en garde du maire.
Ne pas s’éloigner du chemin, ne pas chercher ce qui n’existe pas ou ce qui n’existe plus. Pourtant, Brodeck fera exactement le contraire.
Ce qui m'a donné envie de le lire :
Je pourrais dire que nécessité a fait loi (cf. plus haut). Mais j'apprécie la plume de Philippe Claudel et je me suis réjouie à l'idée de lire ce livre !
Mon avis après lecture :
Comme toujours, Philippe Claudel emporte son lecteur dans son monde. Un monde âpre, dur, pesant, étouffant presque, avec une écriture ciselée que les lycéens ont distinguée en 2007 par le Goncourt des Lycéens, ce qui prouve bien, une fois de plus, qu'ils ne cherchent pas la facilité lors de leur choix !
Bonheur de phrases :
"J'ai le sentiment que je ne suis pas fait pour ma vie. Je veux dire que ma vie déborde de toute part, qu'elle n'est pas taillée pour un homme comme moi, qu'elle se remplit de trop de choses, de trop d'événements, de trop de misères, de trop de failles."
"Il y a de toute ans ce fatras. J'y vide ma vie. Écrire soulage mon cœur et mon ventre."
"Au fond, raconter n'est peut-être pas un remède si sûr que cela. Peut-être qu'au contraire raconter ne sert qu'à entretenir les plaies, comme on entretient les braises d'un feu afin qu'à notre guise, il puisse repartir de plus belle."
"On craint celui qui se tait, celui qui ne dit rien. Comment savoir ce que pense celui qui demeure muet ?"
et une dernière à laquelle je ne peux résister... "L'idiotie est une maladie qui va bien avec la peur. L'une et l'autre s'engraissent mutuellement, créant une gangrène qui ne demande qu'à se propager."
et une dernière à laquelle je ne peux résister... "L'idiotie est une maladie qui va bien avec la peur. L'une et l'autre s'engraissent mutuellement, créant une gangrène qui ne demande qu'à se propager."
On en parle ailleurs :
Ce livre est paru il y a déjà cinq ans... autant dire une éternité (ou peut-être deux ! ;-) à l'échelle de la blogosphère ! Tout le monde en a donc déjà parlé : je vous fais confiance pour trouver !
Je l'ai lu quand il est sorti et je dois dire qu'il ne m'a pas laissé un souvenir impérissable, même si c'set bien écrit.
RépondreSupprimerPour être très franche, je suis comme toi : c'est très bien écrit mais je ne suis pas extatique et j'avoue que ce n'est pas le genre de roman que j'ai envie de faire lire au lycée en littérature contemporaine...
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